Dans l'ombre des arbres les hitodamas dansent. [PV Chihaku]

Murasaki n'était pas le genre d'âme à foncer tête baissée dans un mur de ronce, sa tenue, composé d'un kimono et d'un hakama sombre, sans parler de sa cape, était son fourreau. Cela avait donc tout de même une certaine valeur pour elle.
Aussi avait-elle fait le choix de remonter une petite rivière, ayant l'eau jusqu'aux genoux, elle savait que cela la rendait vulnérable, mais cela évitait tous les pièges de la nature, prenant bien garde de ne pas tremper Hiiro no Yuki.

Après quelques minutes de marches, elle se rendait compte que le ciel s'assombrissait, en partie à cause de la végétation, mais aussi, car la journée était sur sa fin. Elle entreprit donc de chasser un peu, n'arrivant qu'à récupérer un lapin bien imprudent. Avec sa prise, elle entreprit d'allumer un feu près de la rivière, afin d'avoir un point d'eau proche.

Elle avait pleinement conscience que cela signalait sa présence. Cependant, elle avait conscience que cette forêt était la meilleure source d'alarme, la moindre branche au sol pouvait craquer, le moindre déplacement bruyant pouvait faire fuir les animaux nocturnes. La seule chose qui pouvait la prendre par surprise était un yokai purement spirituel.

Le feu prit doucement, venant à retirer sa capuche et dévoiler son visage, ainsi que sa chevelure. Il n'y avait personne aux alentours, pourquoi se cacher ? Elle entreprit de dépecer sa prise et de la faire doucement cuire, étant très concentrée sur la cuisson. Sous forme humaine, elle était vulnérable à beaucoup de choses et une intoxication alimentaire la rendrait facile à tuer.

Murasaki poussait un soupire, manger seule n'était pas amusant, il y avait ce manque de présence. Elle observait le katana, qui était posé au sol sur sa droite, se disant qu'une fois ce dernier éveillé, elle pourrait discuter, cuisiner selon ses goûts, avoir une vie moins emplie de solitude. En position seiza, elle continuait à faire doucement tourner le gibier, l'odeur venant à être très agréable, estimant que son repas sera prêt d'ici une dizaine de minutes.

Dans l'ombre des arbres les hitodamas dansent.

Ambiance sonore - ♪♫ - ıllıllı

Les terres Tsubaki, seul endroit où les siens recevaient une réelle estime et ce qui amenait bien des manjushage à se retrouver d'ailleurs ici. Cette simple idée que les regards ne portaient pas de dégoût profond ou de dédain était probablement ce qui amenait Chihaku à apprécier tout autant l'endroit que le reste de son clan en réalité, des pensées assez simples. Cependant, le voyageur se décida à profiter cette fois-ci du bois qui se trouvait à sa proximité. Le soleil ayant depuis longtemps disparut pour laisser la route éclairée simplement par les quelques rayons de la lune, il dût se résoudre dès lors à faire une halte, tant pour se reposer que pour éviter un danger possible.

Quelque chose attira son regard, de la fumée qui s'élevait plus loin alors. Il semble qu'un voyageur ait aussi dut s'établir tardivement dans l'endroit. Cherchant alors à retracer l'endroit où se trouvait le campement improvisé, l'homme remonta avec une certaine aisance la piste pour finalement déboucher à proximité du point d'eau et de la femme en train de faire cuire un morceau de viande. Chihaku n'avait pas été le plus silencieux et sans aucun doute, elle l'aurait remarquée. Le voyageur se décida alors de prendre les devants et à laisser sa voix se faisant entendre :

« Bonsoir, excusez donc ma venue... J'ai été attiré par la fumée qui se dégageait. Si votre feu brûle avec assez d'intensité, pourrais-je m'imposer auprès de vous, un voyage est plus agréable quand nous faisons face à de nouvelles personnes, selon moi. »

Le stratège semblait offrir un sourire sincère et chacun de ses mots étaient prononcés avec une lenteur bien particulière, comme si ce dernier ne voulait jamais se presser, que ce soit dans ses mots ou ses gestes. Murasaki pourra d'ailleurs voir plus d'une chose étonnante chez cet homme qu'elle rencontrait pour la première fois : Tout d'abord ses habits, dignes d'un bon voyageur tant ils semblaient usés, portaient le noir symbolique du clan Manjushage. Le teint de l'homme semblait à l'opposé de celui de la voyageuse d'ailleurs, là où elle semblait bronzée et portait un teint digne d'un bon forgeron, lui avait une peau digne d'un rayon de lune, pâle et luisant sous l'influence de l'astre lunaire. Ses cheveux, une cascade semblant fait d'encre tant ils furent noirs, se mêlaient aux ténèbres qu'offraient cette heure, au contraire de la couleur argentée de ceux de l'arme, encore une fois. Finalement, le plus surprenant restait sans aucun doute ses iris, les deux yeux brillaient d'une couleur dorée bien singulière qui offrait un charme particulier à cet homme. À sa ceinture, finalement, se trouvait deux armes : Son katana habituel ainsi qu'un wakizashi sans aucune tsuba !

Murasaki entendit les craquements sous les pas de cette personne, venant à rapprocher Hiiro no Yuki contre elle, collant le katana contre son mollet. Elle usait de ses oreilles pour estimer la distance et la vitesse d'approche de la personne. Aucun bruit métallique ? Ce n'était donc pas un guerrier. Un bandit ? Cela pouvait être plausible, n'ayant rencontré que des bandits en armure de cuir. Mais cela ne semblait pas logique, les bandits agissaient en groupe, pour surprendre par leurs nombres.

Elle n'avait pas tellement d'autres possibilités que d'attendre de voir ses agissements, étant déjà prête à user de son pouvoir si la présence se montrait hostile, sa posture ne permettant pas un déplacement rapide.

Sa tête et son regard se posaient vers l'endroit de la voix, voyant la personne éclairée par le brasier qu'elle avait allumée et entretenue. La yokai ne posa pas le regard vers le visage de la personne, mais ses armes, avant de regarder la personne droit dans les yeux, n'étant nullement troublée par la couleur qui était reflété. Murasaki supposa qu'il ne devait pas être humain, un yokai ? La possibilité tait grande avec cette couleur singulière.

Tout doucement, elle vint à indiquer une place en face d'elle, le plat de la main vers le ciel.

- Prenez donc place. Je ne peux que partager ce maigre gibier.

Murasaki quitta sa posture pour croiser jambes. Elle ne savait pas trop quoi penser de cette personne. Mais elle ne pouvait refouler une personne qui semblait appartenir à son clan, cela était déplacé et aussi, l'obscurité pouvait cacher bien des menaces invisibles.
Elle profitait que l'homme s'expose un peu plus à la clarté du feu, pour l'observer, trouvant intérieurement assez amusant qu'ils étaient comme la nuit et le jour, sur le plan de l'apparence. Elle jugeait que l'homme devait faire une tête de plus qu'elle, ses armes ne laissaient planer aucun doute sur le fait de savoir les utiliser, étant un bon mélange selon elle.

- Je me nomme Murasaki et vous ?

Elle préférait savoir à qui elle avait affaire. Pour l'heure, elle restait tout de même sur ses gardes, qui sait si cet homme ne s'approchait pas uniquement pour être à portée de lame. Elle restait anormale et on pouvait supposer rapidement sa nature surnaturelle avec son apparence.

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Admirant alors la personne qui se trouvait face à lui, un constat similaire ressortait dans l'esprit de Chihaku : Sans aucun doute, ils étaient très différents aux sens de l'apparence. Cependant, sa tenue le rassura quelque peu sur la femme se trouvant face à lui. Quelqu'un donc de son clan ? Peut-être devrait-il se détendre un peu plus. Il se dirigea alors vers la place indiquée par la femme, gardant des mouvements des plus lents, l'homme finira alors par prendre place. Bien entendu, le voyageur se délestera de ses armes, les déposant proprement à sa gauche : Le katana étant le plus proche de lui, le wakizashi suivant directement.

L'homme ne semblait pas avoir d'intention mauvaise, cela était au moins assez visible : Il ne se pressait pas, se délesta de ses armes sans aucune gêne et restait face à la demoiselle avec le même sourire agréable que toujours, les flammes venant faire briller son regard si particulier. Ce qui était plus perturbant était la confiance qu'il forçait sur Murasaki : Le voyageur n'était pas inquiet que celle-ci puisse être un bandit et autre, rendant toutes les précautions qu'elle prenait assez... étrange face à ce contraste. Si elle faisait attention, elle pourrait malgré tout remarquer que l'homme n'était pas aussi détendu qu'il semblait l'être, Chihaku détaillant du regard l'intégralité de ce qu'il se passait, regardant même la femme face à lui. Mais, aucune mauvaise pensée ne transparaissait pas dans ses yeux envers sa consœur manjushage.

« Je vous remercie de tolérer ma présence. Je n'en demandais pas tant, mais je ne refuserais pas non plus de partager un repas. »

Répondra alors le stratège alors qu'il viendra chercher dans sa tenue pour en tirer un léger paquet : Le tout semblait être un morceau de linge repliée sur lui-même. Et alors que le voyageur l'ouvrit, il dévoila simplement du bœuf séché dont il prendra un morceau pour venir mordre dedans en attendant alors que la cuisson se passe. Après avoir prit un morceau, les gestes lents et mesurés donnant une certaine élégance, il vint tendre dans la direction de la femme la viande.

« Damoiselle, vous pouvez nommer cet humble voyageur Sorakado Chihaku. Sora du caractère pour ciel et Kado de celui pour porte. Chi provient de celui pour sagesse et Haku pour blanc. Je ne pourrais malheureusement pas l'écrire pour vous tout de suite. »

L'homme restait encore une fois des plus agréables envers la femme, la graciant du même et éternel sourire.

La yokai vint à réduire sa garde en voyant que l'homme avait daigné se désarmer. Certes, il avait toujours ses armes à portée de main, mais elle avait moins de crainte d'une attaque surprise. Elle ne détournait pas le regard pour autant, si ce n'est pour surveiller la cuisson de la viande. Elle ne percevait pas d'animosité, cependant, Murasaki ne pouvait s'empêcher d'être méfiante.

Partager le repas était quelques choses de naturel pour la tsukumogami, cela permettait de discerner un peu les personnes, mais surtout permettait de réduire une possible hostilité, en montrant qu'elle n'était pas un monstre malfaisant.

Murasaki observait le mouvement de son compagnon du soir, fronçant un peu du front en le voyant chercher quelques choses dans sa tenue, avant de comprendre qu'il s'agissait de boeuf séché. Elle essayait de paraître insensible, mais se rappelait du goût de cette viande, ayant l'eau à la bouche.
Doucement, elle tendit sa main dans le but de récupérer en douceur le morceau généreusement offert.

Son mouvement fut cependant arrêté en apprenant le nom de la personne, ce nom n'était pas inconnu, venant à fouiller dans sa mémoire.

Murasaki avait entendu parlé de cette famille, prônant la vertu, quand le clan était encore avec son symbole. Si elle n'avait jamais eu de contact avec eux, les rumeurs suffisaient à eux seul. Elle ne s'était jamais risquée à approcher cette famille, craignant que cette vertu ne puisse accepter une créature comme elle.

Murasaki saisit la viande séchée et prit une petite bouchée, observant le feu avant de dire.

- Nul besoin de l'écrire. Je le connais.

Elle éprouvait de la curiosité. Comment cette famille avait survécu à la chute ? Qu'elle avait été le prix à payé ? Mais elle le savait très bien, cette époque sombre avait été le signe de disgrâce et de honte pour nombre de familles. Le crépitement du bois ayant servi au feu sorti la yokai de ce souvenir fugace et du silence qui avait suivi sa phrase.

- Vous êtes donc un voyageur. Je suis une mercenaire, je fais de nombreux travaux, principalement la chasse aux bandits et menaces pour le clan.

Elle regardait Chihaku pour observer sa réaction, cela était sa dernière tentative pour déceler sa pensée, après elle aviserait. Un bandit ne pouvait rester stoïque devant une telle déclaration, même si elle restait sur le fait qu'un bandit solitaire était extrêmement peu probable.

Dans l'ombre des arbres les hitodamas dansent.

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Connaissait-elle simplement les caractères dont il parlait ou plus simplement sa propre famille ? La chose le rendit quelque peu curieux, bien que rien ne se montra encore une fois sur son visage. Le voyageur admira alors un instant la yokaï face à lui, son apparence était bien singulière, il ne se rappelait pas spécialement d'avoir entendu parler d'elle, mais il restait en grande partie loin des autres membres de son clan, malheureusement. Chihaku voyageait bien trop pour pouvoir se poser dans une région et après tout, c'était en grande partie vraie aussi pour les personnes portant la couleur noire : Lequel n'était pas un vagabond ?

« Une bonne chose que vous le connaissiez, je dois avouer que cela me sauve le trouble de devoir vous l'écrire. Et c'est une noble mission que de servir les clans et d'écarter les menaces. Une chose que je peux apprécier, comme beaucoup d'autres manjushage. Cela et une certaine proportion à chasser les Yokai se trouvant autour. »

Le voyageur avait su rester calme en passant ce léger teste que la femme venait de lui poser, ne s'en rendant peut-être pas compte. La suite pouvait cependant venir à la perturber plus qu'il n'avait été perturbé, la chasse aux yokaï étant abordée par Chihaku sans que ce dernier n'exposa précisement de penser dessus, passant rapidement sur ce devoir que d'autres membres du clan avaient pu se donner.

Son sourire perdura alors qu'il regarda Murasaki : le tout ne semblait pas spécialement piquant, même assez doux pour du bœuf séché. Secouant la tête quelque peu, le sujet changea alors qu'on pouvait le voir regarder et apprécier le ciel étoilé qui s'élevait au-dessus des deux personnes, parlant sans détourner son regard du tableau céleste :

« Les moments ainsi sont aussi appréciables. Les gens marchent beaucoup et particulièrement les nôtres, s'avançant sans s'arrêter. Tout cela est assez poétique, mais lassant par moment. Je pense que ce genre de décor et de présence est aussi une chose agréable et précieuse. Pouvoir apprendre de notre voyage et s'arrêter est quelque chose que beaucoup peuvent oublier. Une course sans fin pour l'honneur, sans prendre le temps de découvrir tout ce qui est autour, ne serait-ce pas fauté envers la vie elle-même ? Enfin, pardonnez mes nombreuses divagations, cela doit vous sembler bien étrange en réalité. Mais, voyagez-vous aussi seule ? N'est-ce pas trop dur ? »

Peut-être que si son compagnon avait entendu parlé des rumeurs sur Murasaki, il ne serait pas aussi calme. La yokai relâcha la pression, elle n'avait pas décelé de peur, d'hésitation, de frisson, rien ... rien qui ne trahisse une potentielle peur qu'un bandit aurait pu avoir. Elle arbora un visage interrogateur quand Chihaku parlait de "trouble", était-il complexe de l'écrire à même le sol ou même dans la paume de la main du yokai ? Oui, Murasaki n'aurait pas été dérangé d'avoir sa main servir de support d'écriture.

Elle ne fut pas sensible au compliment d'accomplir la quête des Manjushages ou de chasser les yokais malfaisant. Elle ne faisait qu'accomplir son devoir, ce devoir qui faisait de l'ombre aux autres clans et était la seule lumière.

La tsukumogami vint à regarder rapidement vers le ciel et comprit que l'homme regardait le ciel étoilé. Elle écoutait par la suite les propos de son interlocuteur. Elle n'arrivait pas à bien comprendre où il voulait en venir. Errer n'était pas un choix pour le clan, mais une malédiction que les autres clans avaient fait subir, une malédiction que les actes sauront briser au fil du temps.
S'arrêter n'était pas vraiment un luxe selon la yokai, mais une nécessité, pour se reposer, panser ses blessures ou encore restaurer son âme fatiguée des pérégrinations incessantes.
Le terme de course pour l'honneur faisait brûler un peu son esprit. Elle estimait qu'il n'y avait pas de mal, car nul ne savait quand on viendrait à décider que son clan devait disparaître, les Manjushage n'avaient pas de pouvoir sur les autres clans, devant ramper pour survivre, l'honneur était essentiel pour certain afin de ne pas mourir.

Elle vint à entendre la question sur la dureté du voyage en solitaire. Murasaki ne put s'empêcher de toucher le fourreau de son katana.

- Un souvenir me permet de ne pas sentir le poids de la solitude, même s'il ne peut égaler la conversation avec des personnes.

La yokai se dégoûtait de dire cela, elle ne voyait pas Hiiro no Yuki comme un objet, mais elle ne pouvait clairement pas prendre le risque de dire qu'elle espérait que le katana devient un tsukumogami. Elle savait que les créatures étaient mal vues, alors en élever une.

- Concernant vos propos sur l'errance. Votre vision est intéressante. Cependant, avons-nous le choix ? Nous ne pouvons que trimer en attendant que notre heure soit venu. Viendra un moment ou nous pourrons nous lever à nouveau et faire jeu égal aux autres clans. Si nous ne courons plus, allons-nous à nouveau subir la traîtrise des autres et perdre notre maigre droit de vivre ?

Murasaki avait une petite flamme dans les yeux, celui de la revanche, alors que son corps tremblait légèrement. Elle ne désirait pas subir une nouvelle chute, elle ne désirait pas retourner à cette époque où la moindre protection d'un membre du clan pouvait vous empêcher de voir le soleil se lever à nouveau. Au fond d'elle-même, il y avait de la rage et de la crainte.

Elle se rendait compte de son attitude et vint à respirer un bon coup pour retrouver son calme.

- Veuillez excuser mon emportement.

La yokai se disait qu'elle était idiote, elle se savait plus disciplinée en temps normal. Elle détestait paraître faible comme ça.

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Intéressante, sans aucun doute cette femme savait offrir de nouveaux points de pensées et être assez innovante dans ses idées. Murasaki venait toucher une partie des choses qu'il n'avait pas dit. Cependant, elle manquait sans aucun doute de finesses et peut-importe où ses idées allaient, il fallait faire en sorte de ne pas les exposer aussi facilement à voix haute. Chihaku secoua alors lentement la tête tandis qu'il parut pensif, prenant un nouveau morceau de bœuf séché, il s'approcha un peu plus de la femme se trouvant face à lui, laissant en contrepartie ses armes un peu plus loin, désormais hors de portée d'un geste plus facile, un moyen peut-être de venir renforcer le sentiment de sécurité de la personne que le voyageur venait de rencontrer ?

Déposant alors le petit emballage en toile, il laissa la femme se servir librement dans la ration de nourriture tandis qu'il saisit cette fois l'outre à sa ceinture pour venir la déboucher lentement. Prenant une gorgée légère, il exhalait une sorte de noblesse qui ne devrait pas être auprès des restants manjushage, sûrement oubliée depuis trop longtemps. Tendant ensuite sa boisson vers la femme pour lui proposer de se servir, ayant sans aucun doute prit une gorgée au préalable pour la rassurer sur la teneur possible en poison de ce qui était servi. Pendant qu'il offrait de quoi se raffraichir, Chihaku reprit la parole :

« Ce sont des questions qui n'ont pas de sens, et même si elles en avaient, elles n'ont aucun besoin d'être entendue. Vous semblez vous être emportée et je ne vous blâme en rien. Mais, souvenez-vous que nous pouvons ainsi être à cause de l'Édit impérial et que nous devons chaque jour remercier la famille impériale de nous offrir cette grâce, comprenez-vous ? »

Une légère remontrance, celle-ci avait pour but de rappeler à Murasaki qu'elle ne devrait jamais laisser ce genre de mots apparaître devant les autres ! Bien qu'en réalité, l'homme ne semblait pas spécialement se déranger de la chose. Elle pouvait le sentir l'inspecter, sans qu'il ne cache ses intentions ou autre, mais le tout bercer dans un sourire assez sincère et quelque peu désarmant pour les gens qui n'en ont pas l'habitude. Regardant la cuisson de la nourriture, il sembla inspecter les broches improvisées que la femme avait faites, semblant presque prendre le rôle d'hôte face à cette mercenaire vagabonde : Qui donc s'occupait de l'autre ? Tout cela se faisait dans un naturel assez surprenant encore une fois.

« Quant à l'idée qu'un souvenir puisse vous aider à combler le vide, cela est une bonne chose. Nous ne sommes cependant pas toujours fait pour avancer seul, c'est une raison pourquoi je reste auprès de qui n'est pas dérangé de ma présence. Vous semblez voyagez beaucoup aussi cependant. Puis-je être curieux et demandé si vous vous dirigiez vers un endroit précis ? Je n'ai aucune destination fixe en ce moment. Si vous veniez à apprécier un peu de compagnie, je vous accompagnerais si votre chemin est aussi à mon goût. »

Une nouvelle invitation, quelque peu surprenante peut-être pour Murasaki. L'homme regardait le ciel par moment, le feu par d'autres, s'occupant visiblement de ce dont on lui laissait s'occuper, mais ne perdant jamais le calme de ses gestes ou le sourire sur son visage, ne semblant pas fort contraignant.

Murasaki observait silencieusement cette personne approcher. Tant qu'il n'entrait pas dans sa zone vitale, il pouvait s'approcher, la yokai venant à noter l'attitude de son compagnon du soir. Beaucoup de noblesse dans ses gestes, au moins sa famille ne semblait pas avoir perdu ses manières.

La créature vint cependant à serrer un peu des poings se faisant gentiment recadrer. Il avait raison, mieux valait se taire et serrer des dents, mais ce n'était pas le genre de Murasaki de se taire face à quelques choses qui lui déplaisaient. Son âge ou le fait qu'elle soit une yokai la donnait une autre vision sur la chose. Si elle permit d'éviter l'éradication du clan, elle n'aimait pas cette sensation d'avoir simplement été prise en pitié par l'empereur. Cependant, elle devait apprendre à faire taire cette pensée qui était dangereuse, mais aussi d'une autre époque.

- Je comprends.

Elle refusa poliment la boisson d'un mouvement de geste, n'ayant pas spécialement soif. Murasaki entendit l'homme demander si elle avait une destination et s'il pouvait être un compagnon de voyage. La yokai ne répondit par immédiatement.

Elle réfléchissait en ce moment même. Avoir un humain comme compagnon pouvait être une idée à double tranchant. Sa nature de monstre, n'allait-elle pas aggraver les rumeurs qui couraient sur elle ? Est-ce qu'au contraire cela allait adoucir l'image d'un monstre sanguinaire qui était charrié à chaque endroit où elle chassait les bandits ? De plus, elle exposait Yiiro no Yuki à un étranger, qui sait ce qui pourrait arriver.

Après quelques minutes de silence, elle prit la parole.

- Je n'ai pas pour habitude d'avoir des compagnons. Cela est souvent source de conflit. Je n'ai pas de destination, je vais là où j'entends qu'il y a besoin d'une chasseuse de bandit et de yokai. De plus, je ne pourrais assurer pleinement votre protection si nous croisons des ennemis organisés ou puissants. Si vous souhaitez m'accompagner, il vous faudra obéir à trois règles.

Murasaki avait établi ses fameuses règles après la chute, ayant eu soixante ans pour les consolider et en faire des sorte de lois pour ceux qui voulaient la rejoindre.

- Première règle, vous ne pourrez saisir Hiiro no Yuki qu'avec mon autorisation. Même si cela doit vous coûter la vie, il est hors de question de toucher ce katana sans que j'y consente. Deuxième règle, tout ce que vous verrez et apprendrez sur moi devra rester au fond de votre gorge et ne jamais en ressortir. Troisième et dernière règle, si vous venez à être une menace, je vous considérerais comme un bandit. Si vous acceptez ses trois règles, je consentirai à vous laisser m'accompagner.

Murasaki était très dur dans ses conditions. Mais elle ne pouvait se permettre d'être ralentie dans sa quête et encore moins de prendre des risque inconsidéré, même envers un membre du même clan. Elle pouvait protéger les Manjushage, mais souhaitait rester dans l'ombre le plus longtemps possible, afin d'éviter tout rejet ou pire.

En attendant la réponse de Chihaku, elle vint à se concentrer sur la viande, qui semblait enfin cuite.

Dans l'ombre des arbres les hitodamas dansent.

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Chihaku hocha la tête en voyant que la femme se montrait assez docile face à la remontrance qu'il lui avait offerte, une bonne chose n'est-ce pas ? Aucune discussion, aucune protestation, Murasaki avait sut contenir tout autre débat en comprenant que de donner voix à un mécontentement envers le pouvoir impérial était semblable à laver son cou avant d'être exécuté. L'outre refusée par la femme, il la ramena alors à nouveau à sa ceinture pour l'écouter tandis qu'elle semblait pondérer plus gravement la possibilité qu'il l'accompagne et ce que cela devait dire.

Des conditions, beaucoup de conditions pour quelques temps ensemble, tout cela est bien évidemment suspect dans un sens, la deuxième étant après tout la plus étrange : Que pourrait-il bien voir qu'il devrait garder pour lui absolument ? Aucune question ne venait pourtant face à ces quelques mots qu'elle offrait. Après tout, elle ne dirait probablement rien de particulier même s'il l'interrogeait, n'est-ce pas ?

« Je ne les accepte pas, je ne suis pas intéressé, nous voyagerons de notre côté après. »

Dira le voyageur, doublé d'un léger rire qui pourrait perturber dans cette situation. Encore une fois, ne semblant pas presser par les conventions communes, il tourna son regard sur la viande désormais cuite de la femme, laissant quelques secondes de plus de silences planés. Le stratège se décida à reprendre la parole malgré tout pour venir expliquer le fond de sa pensée un peu plus clairement :

« Je n'ai aucune envie spécialement d'être liée par des contraintes que je ne comprends pas. Et vous ne semblez pas plus envie de passer du temps à mes côtés en imposant de telles conditions. De plus, il est parfois bon de ne pas regarder ce qu'on ne devrait pas voir, n'est-ce pas ? Ainsi, profitons simplement de ce campement sans trop s'interroger sur le reste, demoiselle. Il est bien triste que je ne profite que d'une soirée de la compagnie d'une femme aussi belle, mais je ne me risquerais pas à vous offrir ma parole de me laisser trucider à votre première suspicion, tout cela ne saurait me satisfaire réellement, comprenez. »

Attendant alors à nouveau la nourriture, il la regardait avec un certain sourire comme pour donner un peu plus de cachet à son précédent compliment concernant la beauté de l'arme. Attrapant un autre morceau de viande séché pour grignoter malgré la possibilité d'être servi un peu de viande, Chihaku laissa son regard dérivé alors vers le ciel.