[CLOS] A la vue des cosmos blancs (PV Katsuyuki)

Il était fort surprenant de voir les réactions qui traversaient le jeune homme assis à tes côtés. Et si une partie de ton être ne pouvait complètement relâcher ta méfiance, ou en tout cas cet état d’alerte qui allait avec ton rang, l’autre s’adoucissait devant lui. Il semblait si humain, si jeune et pourtant avec une claire volonté de se reprendre. Et tu étais également conscient que cela ne venait pas d’une projection de ton affection pour ta fille sur cet homme. Hanae était bien moins dans la gêne, clairement plus piquante. Non, c’était autre chose, comme si tu pouvais voir en lui ce que tu aurais pu devenir. Quelque chose qui te poussait à lui offrir ce sourire sincère.

Pourtant, il fallait que tu te reprennes. Le sérieux de cette conversation ne pouvait se laisser amadouer par la douceur que tu avais pour Fukuro. Et si cela ne parvint pas à complètement effacer le sourire sur tes lèvres, ton regard, lui, vint reprendre l’éclat terne de l’or durcit. Tu lui en demandas bien plus, bien trop même, et quand tu le vis se reprendre, tu eus presque envie de t’en excuser. Au fond de toi, Izaya, tu espérais que tu ne serais pas celui qui éteindrait le feu qui brûlait en lui. Oui, tu craignais d’être à l’origine de la perte de sa candeur, sa jeunesse… sa beauté, peut-être, d’une certaine manière.

« Merci. »

Ta voix était profonde, engorgée d’émotions contradictoires qui vinrent rendre ton ton plus grave qu’à l’accoutumé. Un souffle s’échappa de toi, avant que tu n’oses bouger vers lui. Ta main se tendit vers lui, hésita un instant, et finit par se poser contre sa joue, comme tu aurais pu le faire avec Hanae, avec un proche ou un enfant.

« En échange de cela, je vous promets de rester à votre écoute. Si un jour, je vous en demande trop, j’espère que vous oserez me le dire. »

Tu ne pouvais pas accepter d’être celui qui l’abîmerait, c’était certain. Ne retenant pas ta main bien longtemps contre sa peau douce, tu finis par te redresser et ce fut à ton tour de te calmer. Pas que ton corps s’embrase, plutôt qu’un sentiment étrange monta dans ta tête. Tu n’avais pas été protecteur de la sorte avec quelqu’un depuis si longtemps que cela te mettait mal à l’aise, t’interrogeait sur ta capacité à utiliser les ressources de ta nation. Tu fuis ainsi la conversation en cherchant une autre tasse, resservant un peu de thé que tu avalas doucement, le regard braqué dans le vide.

« Trouvez le, et vérifiez son état, Fukuro. Je dois savoir s’il est bien portant ou non. Ta gorge se serra. J’aimerais également savoir s’il cherche à s’allier à quelqu’un. Si vous trouvez de la correspondance ou des traces d’échanges avec d’autres vivants, ne ramenez rien, mais faites-moi une description la plus fidèle possible. »

À chaque parole que tu rajoutais, tu ne pouvais ignorer qu’en agissant ainsi, tu te rendais maître du destin d’un porteur de ton nom. Et qu’il faudrait bientôt prendre une décision vis à vis de cela. Décision que, pourtant, tu repoussais sans cesse.

« Personne ne sera au courant de cela, ne répondez à personne qui vous posera une question à ce sujet, qu’il s’agisse d’un membre du palais ou un de mes parents. Tu revins l’observer. Les prochaines fois, pensez-vous pouvoir rejoindre mes appartements directement sans vous faire voir ? »

Tu ouvrais ainsi la porte à une collaboration des plus secrètes, et d’une certaine fois, des plus intimes, mais tu étais certain de ton choix, encore plus maintenant que tu avais croisé sa route.

En venant dans cette demeure seigneuriale, Kakeru ne savait guère comment il devrait se comporter face à l’homme qui dirigeait un clan entier après avoir emporté la victoire face à son prédécesseur durant un duel. Il craignait d’avoir affaire à un homme rude, brutal et strict. Il s’était préparé à toutes les éventualités devant l’irrespect qu’il s’apprêtait à commettre sans même le savoir.

Pourtant, lorsqu’il attendait avec ses idées préconçues, il fut surpris d’apercevoir la silhouette élégante et charismatique. Il en fut d’autant plus au fil de la conversation, découvrant alors un homme calme et attentionné envers ses enfants Sakura. Ce qui devint la cerise sur le mochi était la proximité qu’avait accordée le daimiyo. Jamais, Ô grand jamais, Kakeru aurait espéré frôler ne serait-ce qu’un bout de tissu du revêtement seigneurial. Rien des idées qu’il avait imaginé ne s’étaient réalisées. Il en fut bouleversé comme soulagé. Cette rencontre mit un désordre sans nom dans son rythme cardiaque et respiratoire. Grâce à cet échange, il ancra dans son esprit une image de son daimiyo : celui d’un homme respectueux, droit et d’une agréable bonté.

Un nouvel adjectif s’ajoutera bientôt à la liste : paternel. En effet, le dernier geste qu’offrit le dirigeant à Kakeru ainsi que ses paroles avaient tout d’un père réconfortant son enfant. Kakeru ne pouvait s’empêcher de transposer son géniteur dans les traits du seigneur, non sans provoquer une pulsion dans sa poitrine. Quelque chose venait de se rompre. Une barrière. Celle qui s’était naturellement forgé entre un citoyen et son daimiyo. Kakeru ne pouvait plus à présent voir Ouka-sama comme un être qu’il ne pouvait approcher. C’est pourquoi son visage se figea un instant, souhaitant graver ce moment en lui. Tout comme la chaleur de cette main paternelle, qu’il vint resserrer contre sa joue avec délicatesse.

« N’ayez crainte. Vos demandes sont pour moi une bénédiction. Jamais je n’y verrais un trop que je ne peux accomplir. » Répondit-il avec un léger sourire.

Bientôt, la tendresse laissa place à une lourdeur dont s’était accoutumé le chasseur. La daimiyo donna ses directives, devant la grande attention de Fukuro. Il n’en perdit pas une once et s’inclina légèrement en acquiesçant avec foi à la demande.
Il en fit de même pour les dernières paroles tandis que tu y ajoutais.

« Daimiyo-sama. Moi, Fukuro, je prête serment ici.  Je ne vous décevrais pas. »

Fukuro s’autorisa à se relever, brandissant son imposante silhouette dans l’ombre de la pièce.

« Ouka-sama… Il ne pût s’empêcher, malgré le sérieux de cette conversation, de déposer un nouveau brin de clémence. Je vous remercie pour votre chaleureux accueil et votre grâce. Il vint se gratter l’arrière du crâne tout en scrutant le sol. Je ne pensais pas … et bien… être si proche avec vous. Il osa replonger son regard dans celui du seigneur. Une dernière fois. Mais vous êtes une personne tout comme moi. Alors, si je peux vous apporter un certain confort, en discutant d’homme à homme. Je serais ravi de remplir ce rôle.
À présent, si vous voulez bien m’excuser.. »

Après autorisation du daimiyo à prendre le large, Fukuro reprit son manteau qu’il déposa sur ses épaules rapidement. Il regagna l’entrée du palais où il récupéra ses effets personnels, dont son arc qu’il scruta quelques secondes avant de l’installer autour de lui. Remerciant les gardes pour leur travail, le shinobi jeta un dernier regard à la demeure ainsi que ses alentours avant de quitter l’enceinte seigneuriale.

Il était temps de se remettre en route…