Courrier de Hibiki

J'ose espérer que ce printemps te rend aussi épanouie que nos cerisiers en fleurs et te conserve dans la bonne santé qui est la tienne.

Cette lettre me trouve bien attristé de t'écrire pour la raison qui m'y pousse. Je ne crains de ne pas être l'attendu messager d'une joyeuse saison puisque je viens, par la présente, t'annoncer une triste nouvelle.

Hakuba s'est éteint la nuit dernière. Je me souviens toute l'affection que tu avais pour cet étalon qui était plus que ta monture, un véritable compagnon d'apprentissage. Il était d'un caractère impétueux, mais ta douceur l'enrobait à chaque instant de ta présence près de lui. Je ne m'épancherai pas sur tous les souvenirs qui affluent quand je repense à cette période, je souhaitai simplement te livrer cette information.

Si ton chemin tend à passer près des écuries, je serai ravi de partager un instant à tes côtés, il me semble qu'une éternité s'est écoulée depuis notre dernier thé, au début de l'hiver.

KIYOMASA Katashi

Kougen-sama,

Vous semblez être une femme parfaite, si ce n’est une hypocrite. Vous pensez agir par empathie désintéressée, mais vous découvrirez bientôt que vous faites seulement cela pour soulager votre cœur. Hier comme aujourd’hui, vous vous montrez égoïste. Ne perdez point votre temps à vouloir soulager mes peines, vous n’en avez pas les moyens.

Rendez-le-heureux. N’apportez jamais d’ombre dans son cœur. Vivez. C’est désormais votre devoir.
Je saurai rester à ma place si vous restez à la vôtre. Pour le reste, ne nous revoyons plus.

Uchida Tsuruyo

Quelle joie de trouver en cette matinée vos mots. J'ai en effet pu admirer l'orée du printemps dans les majestueux jardins impériaux. Mes pas m'ont poussé, d'ailleurs, à reprendre le chemin que nous avons parcouru ensemble lors de notre rencontre. J'ai pu apprécier la couleur poudrée des cerisiers, laissant apparaitre leur doux manteaux roses et blancs. J'aurai tant aimé partager cet instant de contemplation avec vous. Les paysages sont toujours plus beaux en bonne compagnie.

Malheureusement, les bourgeons de l'amour, eux, semble être bien farceurs... ! D'une même teinte que ces beaux cerisiers, je n'ai trouvé que des mauvaises herbes. Connaissez-vous le Hirugao ? D'une couleur innocente, à la beauté délicate et sauvage ? J'ai rencontré tout cela. Or, en cette personne se trouvait bien là le malheureux surnom que lui donne : "les boyaux d'Oni" ! Elle s'enroule autour des autres fleurs jusqu'à l'en couper tout moyen de vivre, en les étouffant ! Fort heureusement, bien que difficile à manier, j'ai réussi à m'en défaire ! Il s'agissait là de l'héritier Kiyomasa, le connaissez-vous ?

Ces rendez-vous arrangés sont de plus en plus pénibles. J'aimerais pouvoir en rire à vos côtés. Et vous, avez pu faire éclore le bourgeon de l'amour, que je devine Camélia ?

J'ai tant de choses à vous dire et visiblement tant de choses à écouter de vos lèvres. C'est avec une inquiétude certaine que je lis vos tourments, que vous taisez pourtant. Votre présence manque à mon cœur esseulé. J'aimerais vous aider : voudriez-vous que je vienne vous rendre visite, ces prochaines semaines ?  

Kigiku Hanako.